Sociologie de L'immigration 1

Publié le par RAPH'

L'immigration est aujourd'hui une préocupation majeure des habitués du bar local et de nos politicars. Cette mascarade electorale mérite donc une étude plus précise a mon sens , histoire de connaître la réalité des choses. Dans un premier temps , j'ai choisi un cas parmis tant d'autre pour répondre brièvement a cette question : qu'est ce qu'un émigrant ? Voici donc l'entretient que j'ai réalisé et l'analyse que j'en ai tiré. 

 

 

Polina , de nationalité Russe et originaire de Saint-Pétersbourg ,a vingt-neuf ans et entreprends depuis

trois ans des études de sociologie en France, un domaine apparemment répandu en Russie. Je l'ai rencontrée

en l'abordant à la sortie de la cité universitaire internationale et elle à bien voulu réaliser un entretien pour

notre enquête, autour d'un café au lait. Nôtre discussion à cependant malheureusement du cesser au bout

de trente-cinq minutes car sa mère, arrivant de Moscou, l'attendait . Cela n'a pas empêché un partage riche

entre nous qui s'est d'ailleurs poursuivi dans les transports en commun et où elle s'est avérée extraordinairement

enthousiaste , détendue , et prompte à rire .

 

« Très tôt, j'ai eu l'esprit interculturel »

Comme j'ai déjà dit ma mère parle français, elle travaille avec la France, elle y va souvent, et on peut dire qu'on a en quelque sorte adopté les coutumes françaises, au sens ou dans notre maison on parlait parfois le français, des amis français venaient...Dès mon enfance je me sentais déjà proche de ce pays.

Déjà dès mon enfance je suis allé en France avec mes parents, et puis ….je suis aussi venue ici parce qu'en France eh bien ...Je voulais aussi partir en Italie mais en France l'éducation est beaucoup moins chère , plus accessible... c'est beaucoup pour ça aussi ….

En fait ma famille est très «étrangère» dans le sens ou c'est très mobile , on a bougé beaucoup , dans le cadre de l'URSS d'abord parce que c'était fermé mais après ma mère elle travaille a l'étranger , elle parle très bien français , elle travaille dans les relations internationales, donc il y avait toujours des invités chez moi, des étrangers.

Et puis on à voyagé beaucoup quand j’étais petite, quand j'avais 16 ans je suis partie aux USA dans le cadre d'un programme international où y avait 200 jeunes de pays différents et c'est vrai que ça m'a sans doute influencé beaucoup et tout ça m'a donné l'esprit interculturel, ça m'a donné envie, j'ai toujours été sûre qu'un jour je partirais faire mes études à l'étranger.

Je savais bien que ce serait compliqué mais...plutôt non, je n'ai pas eu de grosses désillusions en arrivant ici, j'avais conscience que ce serait différent, même si je ne savais pas quoi exactement ...mais je préférais ne pas me faire d'idées avant …

Mais en tout cas je suis maintenant en bonne voie pour atteindre tous les objectifs que je m'étais fixés avant de partir oui, je fais mes études, je réussis, et peut-être je vais pouvoir enfin travailler dans mon domaine , dans la recherche, j'ai deux propositions d'emploi dont une a Biarritz, donc oui je suis bien partie , j’espère que ça va aller bien .

 

Cette expression d' « esprit interculturel » répondant à la question des motifs de sa décision d'émigrer en France, nous fait remonter aux sources du processus migratoire personnel de Polina. Nous revivons avec elle son enfance, ou ces âges premiers qui , nous le savons, construisent l'individu dans sa personnalité , son esprit , et sont en tant que tels déterminants dans les tenants et aboutissants du phénomène qui nous occupe.

A ce point de vue, le parcours de Polina est particulier : elle nous raconte que sa famille à beaucoup voyagé au sein de l'union soviétique ( territoire extrêmement riche au niveau de la diversité culturelle ) et que sa mère est régulièrement en contact avec l'Europe et la France, à tel point ces autres cultures ont littéralement pénétré le cercle familial où grandissait la petite Polina . On peut donc constater chez elle une habitude précoce de la rencontre des cultures , une prédisposition à l'ouverture facteur d'un grande curiosité envers l'ailleurs. Cet état aura créé chez elle les bases d'un ensemble de conditions suffisantes à l'émigration , le terme de prédisposition n'étant pas utilisé au hasard : «j'ai toujours été sûre qu'un jour je partirais faire mes études à l'étranger. » Sa famille l'accompagne et l'encourage dans cette idée.

Mais c'est à l'adolescence, nous le verrons, que se complète ce processus pour aboutir à une émigration définitive. C'est en effet pour Polina comme pour les autres, l'époque des projets de vie , de la projection dans l'avenir. Elle effectue a ce moment nombre de voyages à l'étranger qui vont substituer à la curiosité innocente de l'enfant un processus de comparaison entre le chez soi et l'ailleurs d'une adulte en devenir qui imagine son futur. Consciemment ou pas, émerge une mise en balance des potentiels respectifs de la terre d'origine et de la terre d'accueil. Dans la Russie tourmentée des années 90 arrive pour Polina l'idée de la seule porte possible : le projet de vie imaginé est incompatible avec ce qu'apporte le pays d'origine , partir devient l'unique solution.( ce qui se retrouve dans le fait d'une éducation plus accessible en France mise en avant par Polina concernant son choix de la France )

C'est là la condition nécessaire a ce que l'individu quitte tous ses repères pour l'inconnu. On constate un départ a fonction personnelle , sans doute le plus répandu dans l'émigration légale intra-européenne.

 

 

« J'ai mis toute ma vie dans ma valise »

J'ai mis toute ma vie dans ma valise /rit/ je m'en souviens encore. Il y avait dedans , outre vêtements et cosmétiques, quelques objets qui me porte mémoire, quelques photos, quelques objets qui me rappellent la Russie, comme ma poupée russe, mais pas trop.

Dès le premier jour j'ai commencé la Fac, la première année je n'ai pas travaillé parce que j'avais emporté l'argent avec moi et j’étais dans une famille, puis dès la seconde année j'ai commencé à travailler dans la vente de vêtement de luxe / mode.

La première semaine, j’étais hébergée par une famille française, c'étaient les amis des amis de ma mère, qui étaient venus en Russie et avaient décider d'inviter une fille russe, de l'aider s'adapter en France, à entreprendre des études... C'était très gentil de leur part, et donc du coup je suis partie dans cette famille, ils sont venus me chercher à la gare ,ils ont été très aimables, attentionnés et …. Je ne sais pas pourquoi – très intéressés par moi. Je pense que c'est parce que ils ont vu que j'étais partagée Russe et Française.

 

J'étais très stupéfaite par leur maison parce que je viens d'une grande ville, Saint-Pétersbourg, mais quand même, nos maison c'est pas très joli, pas très drôle, et la leur, c'était un grand cottage, très joli. Après ils m'ont fait à manger et j'ai beaucoup apprécié la coutume de la table, on mange, on boit du vin, c'était très intéressant pour moi, donc où toute la première semaine y a beaucoup de choses que étaient bizarres pour moi mais j’étais en même temps très intéressée, les habitudes, les valeurs, les règles, c'était plutôt très enrichissant même s'il y avait beaucoup de choses que je ne comprenais pas.

Je n'ai pas d'anecdotes particulière en tête qui m'aurait fortement marqué à mon arrivé questions différences culturelle, mais s'il y en a, c'est certainement positif. Non s'il y aurait quelque chose c'est plutôt ...euh... En Russie les gens sont très francs, très directs, donc ils commencent à parler tout de suite, et ici à paris tu rencontres les gens et ils ont leurs valeurs, ils sont assez fermés, pas trop mais ils ont leurs valeurs, les règles de savoir faire, les règles de se comporter, donc en fait je comprend pas vraiment ce qu'ils veulent parfois, j'ai rencontré des gens qui....tiens, j'ai un ami, il est très gentils mais... Je... Je ne connais jamais ce qu'il pense, je ne comprend pas qu'est ce qu'il pense, qu'est ce qu'il a dans la tête... on à l'impression qu'il n'a pas de... C'est très bizarre en fait, parce que il est très gentil on parle on est des amis mais, il s'adapte toujours à moi , c'est ça que je ne comprends pas... Et parfois je me dis que peut-être moi aussi il faut que je me comporte de telle façon, que moi aussi je dois être fermée, faut pas que je dise la vérité... C'est pas bien hein, faut être ouverte... Mais parfois je m'oblige d'être fermée comme les autres et c'est un vrai problème pour moi. Après ça dépend des personne mais depuis mon arrivée, en général, je ne vois pas de changement par rapport à ça. C'est toujours la même chose, en général ici à Paris il faut être fermé. Après je suis ici, donc il faut s'adapter, il n'y a pas le choix.

 

 

 

Après avoir suivi ses premières années d'études de sociologie à l'université de Saint-Pétersbourg et plusieurs emplois pour économiser, voici enfin venu le moment du départ. Polina nous raconte. Sa première phrase , ici encore , porte en elle tout un symbole : « j'ai mis toute ma vie dans ma valise, je m'en souviens encore » . Cela nous en dit long sur sa personnalité ; c'est ce que d'aucuns appellent « une détachée » : elle ne laisse pour ainsi dire rien en Russie , puisque les liens avec sa famille ne sont pas rompus, la continuité est naturelle, aucun caractère mélodramatique n'est donné au départ. Elle emporte avec elle quelques photographies, sa petite poupée russe, et quelques autres objets qui, comme elle le dit si bien , « portent la mémoire » . Ce sont des ancrages mobiles , ses origines ne l'enchaînent pas , elles l'accompagnent.

Cette approche du départ transparaît également dans le récit qu'elle nous fait de sa première semaine qui n'est pas dominée par un choc émotionnel comme on pourrait s'y attendre lorsque l'on part a 3000 kilomètres de chez soi , mais par une grande curiosité à l'égard de ce qui et une réelle appropriation de la culture Française , même si elle fait a un moment état d'une certaine perplexité qui pose la question de l'adaptation et de la place accordée a ses origines, le chemin vers l'équilibre personnel.

Quoiqu'il en soit cette attitude est représentative d'une ré-actualisation de l'émigrée par rapport à ce qu'elle est en train de vivre : elle est contemporaine de sa vie et ne se trouve pas dans l'optique d'un passé mythifié qu'il faudrait retrouver . Polina se pose dans un rôle acteur , elle ne subit pas , preuve en est de son parcours : dès le premier jour en France elle rentrait à l'université , un an plus tard elle trouve un emploi et emménage à la cité universitaire internationale. Elle est aujourd'hui complètement indépendante en France .

On retrouve également dans cette étape ce processus d'autonomisation et de distanciation par rapport a la famille et au pays d'origine , ou cette volonté de conquérir par soi-même une place qui n'est pas acquise d'office , pour laquelle il faudra lutter et ainsi littéralement se construire , construire sa vie, en tant qu’individu ; ce qui est inconsciemment signifié dans la deuxième partie de la phrase citée ci-dessus, ce « je m'en souviens encore », révélateur de l'importance du fait, de ce caractère de seconde vie , de nouvelle naissance, qui lui incombe.

 

 

« J'envisage de faire ma vie en France »

Eh bien j'envisage de faire ma vie en France ...et en plus il y a de gros problèmes avec les salariés étrangers maintenant...on ne peut plus vraiment envisager de faire sa vie en France sans être française.... Maintenant avec Sarkozy , ils considèrent qu'il faut se débarrasser des migrants , et de Tous les migrants en fait … Alors je ne sais pas si c'est du racisme envers les Arabes ou quoi , mais ce n'est pas normal en tout cas , et personne n'est à l'abri , même les étudiants, c'est ça notre insécurité …

Après les études , c'est de plus en plus difficile de changer de statut … Moi par exemple je finis mes études , je veux travailler , je veux changer de statut , eh bien ce sera très difficile, c'est très compliqué ...et si ils rejettent ma demande pour travailler je peux plus revenir dessus , je peux plus rester en France, et je dois partir tout de suite … Mais qu'est ce que je vais faire ?!

 

Donc je me suis dit que – en grande partie pour ça – je vais demander la double nationalité Russe-Française, mais aussi parce que je veux vivre en France bien sûr, et que je me sens Française, même si je veux pas rejeter ma nationalité russe ...mais c'est bien , c'est génial d'avoir deux nationalités je trouve …

Ma mère elle n'est pas très contente que je prenne la nationalité Française , elle ne le dit pas mais préférerais que je reste en Russie … Je me sens complètement intégré en France, à part la cuisine, même si j'apprécie la nourriture française, rien ne me manque vraiment de Russie.

Mon temps libre je l'occupe à beaucoup de voyages en Europe, je fais du sport un peu. Après j'aime bien les arts... Je profite un peu de Paris maintenant parce qu'avant je travaillais d'habitude j’étais très occupé mais maintenant c'est ma première année de libre et je visite les musées, comme ça parfois, la musique... C'est plus pour découvrir de nouvelles choses, ce n'est pas du tout la même chose que si je faisait pareil chez moi, je n'y ressent pas la même chose, c'est diffèrent... Je ne sais pas... Peut être c'est que je trouve plus intéressant en France, plus riche, disons plus curieux pour moi, les émotions ne sont pas les mêmes.

Je ne suis pas rentrée en Russie depuis janvier, j'y retourne pas souvent, pas plus d'une fois par an parce que -outre l'argent- je préfère profiter de l'Europe, Espagne/Italie.

 

 

Polina est maintenant établie , installée sur sa terre d'accueil , au sein de cette société, de ce pays, qu'elle a choisi. En cohérence avec ce caractère de nouvelle vie qui commence que nous avons précédemment évoqué, elle va mettre en oeuvre des Stratégies d'Intégration pour satisfaire au mieux les aspirations correspondant à son projet de vie.

Dans ce cadre , elle se situe vraisemblablement autour des trois derniers niveaux de la pyramide des besoins de Maslow , que voici :


 

                                         

                                                         Accomplissement personnel

                                        ( morale, créativité, résolution des problèmes...)


 

 

                                                                        Estime

                                    (confiance, respect des autres et par les autres,estime)


 

 

                                                     Besoin d'appartenance et affectif

                                         (amour, intimité, amitié , famille, sexe, social)


 

 

                                                                Besoins de sécurité

                                          (du corps, de l'emploi, de la santé, de la propriété.)


 

 

                                                             Besoin physiologiques

                                                     (manger, boire, dormir, respirer)


 

 

Il s'agira en l’occurrence pour Polina d'acquérir la nationalité Française , maintenant qu'elle maîtrise la langue et dispose d'un emploi régulier. Cette volonté est certes motivée par son sentiment d'appartenance envers la société Française et sa volonté d'être en conséquence reconnue comme telle mais nous savons pourtant que la nationalisation n'a pas toujours été spontanée , on connaît des cas d'individus émotionellemment Français , présents depuis plusieurs décennies , mais qui pourtant n'ont jamais fait cette demande de par ce qu'ils « avaient oublié qu'ils n'étaient pas français »

Mais les époques se suivent et ne se ressemblent pas, aujourd'hui le calcul qui se fait entre avantages et inconvénients respectifs amène à la demande de nationalité lorsque , comme elle , l'on « veut faire sa vie en France ». Elle apporte une sécurité à la construction qui se fait et permet de palier à cette invisibilité sociale de l'immigré ou au contraire parfois à sa surexposition politique qu'ici seule le fort sentiment qui lie Polina à la France l'empêche de percevoir comme une humiliation.

 

 

« On ne parle plus la même langue... »

Je vois de très grandes évolutions dans mon parcours personnel depuis mon arrivée et... C'est très difficile à dire, je vois comment les choses... Par exemple je vois comment quand j'ai des amis russes qui viennent me visiter, on parle un peu « des langues différentes»... Tu comprends ? Donc, leurs valeurs je ne les comprends plus. C'est un peu bizarre parce que maintenant je vois grâce à ça que je ne suis plus russe, mais je ne suis pas encore française. C'est une sensation un peu bizarre. Si je retourne en Russie par exemple je me sens plus française que russe.

Ben c'est pas bien de le dire mais je n'ai pas de bonnes émotions quand j'y retourne, ça ne me manque pas trop la Russie... Ça fait un peu bizarre d'y retourner et il y a des choses qui me gênent quand j'y reviens, il y a des choses que je vois, dans la rue par exemple, des comportement des gens qui me gênent et euh... Bon quand je visite des choses qui me sont chères pour moi, la maison, le lieu du travail, les musées... Les choses qui sont plus ou moins chères pour moi je ressens la nostalgie, bien sûr...

Mais il me semble que c'est plus la même chose que c'est diffèrent, qu'on y a plus vraiment sa place … Et aussi je sais moi quand je suis allé en France, je suis venue il y a trois ans, on à l'impression que moi j'ai vécu la deuxième vie, je fais des études, j'ai connu plein de gens, j'ai appris la langue, j’apprends l'espagnol, j'ai beaucoup voyagé et... Quand je rentre en Russie, je vois les gens, les choses, y a rien qui à changé, ils font le même travail, ils n'ont pas évolué, ils ont toujours les mêmes habitudes, ils font les même choses...

Donc voilà c'est ce que je ressens... En fait quand je suis revenu au lieu de mon travail après deux ans de mon master, je vois la même table, le même feu, les même stylos, les même feuilles, c'est la même chose, le même patron, y a... y a rien qui se passe ici, les gens sont tellement « lents» que y a pas de changements... C'est bizarre.

Je ramène toujours le vin, le fromage /rit/ et des petits souvenirs... Ils connaissent déjà pas mal parce que ma mère va souvent en France, ils discutent toujours la Russie, la France, moi j'aime bien discuter des différences, et alors je commence à critiquer la Russie, je commence à dire que voilà, tout ce qui se passe maintenant c'est pas normal... Les gens ils sont cons, tout ce qu'il se passe avec Poutine etc...

Ma mère elle dit mais c'est pas bien de dire tout ça ; quand je vois les gens en France, je connais la France plus que toi et j'ai passé beaucoup plus de temps en France, mais quand je rentre en Russie, je ne critique pas la Russie, pour moi ce sont deux mondes différents, j’apprécie la Russie, ses valeurs, comme la France, tandis que toi tu es devenue française, tu critiques la Russie.

C'est très compliqué à dire , mais je me sens … bon je suis toujours russe , donc je me sens plutôt russe,oui... mais maintenant c'est vrai que j'ai apprécié les normes, les valeurs de la culture française , de la société française donc je les prends pour moi aussi , donc en réalité je suis russe et française .

Je suis en France depuis trois ans maintenant donc je me sens française , mais quand même je reste toujours russe a la base. (Polina à confié rêver le plus souvent en Russe, mais parfois en français.)

 

Mais ce processus d'installation pour positif qu'il soit dans le cas de notre enquêtée , ne va pas , même chez elle , sans conséquences, sans entraîner une situation particulière directement issue du vécu de tous les migrants. Nous avons précédemment compris que Polina ne rejetait pas ses origines et les acceptaient comme faisant , quoi qu'il arrive , partie d'elle , ce pourquoi elle souhaite conserver sa nationalité russe en plus de celle Française , considérant ce fait comme enrichissant plus qu'handicapant.

Cependant , depuis trois ans qu'elle est en France , Polina s'est territorialisée par des valeurs qui l'ont séduite, elle a bâtit une construction identitaire en ce sens . C'est dans ce contexte qu'intervient un moment toujours compliqué a vivre pour le migrant , qui est celui du retour – même provisoire – dans sa terre d'origine , et cette sensation étrange de décalage qui transcende tout le séjour . Elle dit d'elle même qu'elle n'aime pas retourner en Russie , et qu'elle le fait donc fort peu . Lorsque cela arrive , elle est encore trop jeune dans l’expérience migratoire pour acquérir ce recul nécessaire à la sérénité , et perçoit son pays avec l'oeuil français : ce qu'elle voit la gêne. Elle connaît le phénomène du dédoublement migratoire , et une sorte d'acculturation.

C'en est flagrant lorsqu'elle rencontre des amis Russes et lâche ces mots éloquents : « on ne parle plus la même langue » . De son propre aveu, les moments ou Polina se sent le plus Française sont lors de ses séjours en Russie.

Il est à ce titre intéressant d'observer les divergences entre elle et sa mère qui pourtant à une plus grande et plus longue expérience de la France que sa fille et qui se refuse a critiquer la société Russe selon une vision comparative, arguant de ce que France et Russie sont deux mondes différents.

Quelle est la source de cette différence ? La forte emprise psychologique qu'a pu avoir le régime soviétique des années durant , ou une temporalité personnelle plus avancée ? Toujours est-il qu'a son âge, dans la phase de vie , et du processus migratoire que Polina est en train de vivre , elle connaît cet entre deux si souvent décrit, plus tout a fait Russe et cependant pas encore Française, du moins de fait, même si elle se perçoit plus dans le ET Russe ET Française que dans le Ni-ni.

Viendra sans doute l'oeuvre du temps cicatriser cette dualité pour transformer pleinement le décalage en richesse.

Entretien , Retranscription , & Analyse : RAFAEL FERRET

 

 

 

 

 

 

 

Publié dans SOCIOLOGIE

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article